30 Sep

Fin décembre 1931, les grandes lignes du projet sont maintenant connues. Il comportera un accès ferroviaire, trois hangars de 120 mètres sur 60, un atelier-magasin et deux pavillons destinés au commandant de l’aéroport et à l’ingénieur de l’aéronautique supervisant les travaux. Enfin, un lotissement est prévu pour loger 10 ingénieurs et 200 ouvriers. Les premiers travaux débutent dès la fin de 1931 par le raccordement à la ligne de chemin de fer Orléans-Chartres. Une longue voie de garage, avec aiguillages aux deux extrémités, est établie parallèlement à cette voie. Un embranchement rectiligne part ensuite vers le village de Boulay pour desservir les futurs bâtiments de l’aérodrome. On peut noter que, dès le début, des difficultés en rapport avec le sol argileux sont rencontrées par la société Paolassinni chargée du terrassement de l’embranchement. Mais en février 1932, le raccordement est terminé. Cent vingt ouvriers de l’entreprise Paolassinni de Valenciennes ont participé aux travaux.

 

Vue aérienne du chantier des deux premiers hangars Caquot. On remarque en arrière plan la ferme du Coudray qui servira de locaux pour les personnels des Ponts et Chausées, au fond le château d’eau en construction juste devant le bois d’eau. Cette photo est certainement prise vers l’été 1933. (Photo USID/Bricy)

Vue aérienne du chantier des deux premiers hangars Caquot. On remarque en arrière plan la ferme du Coudray qui servira de locaux pour les personnels des Ponts et Chausées, au fond le château d’eau en construction juste devant le bois d’eau. Cette photo est certainement prise vers l’été 1933. (Photo USID/Bricy)

Le même mois, la nature des trois hangars est arrêtée. La technique utilisée, originale pour l’époque et inventée par l’ingénieur Caquot , consiste à édifier un caisson de 120 mètres avec un rez-de-chaussée et un étage, le tout constituant l’épine dorsale du hangar. A la hauteur du plancher du 1er étage, partent de part et d’autre du caisson, des toits elliptiques en béton armé pour abriter les avions. De grandes portes coulissantes montées sur des glissières permettent la fermeture du hangar. Il est à noter que contrairement aux hangars Caquot n°1 et n°2, le hangar Caquot n°3 ne disposera pas de caisson central.

Calqué sur un plan original, ce document permet de visualiser la technique employée par l’ingénieur Albert Caquot. La technique est nouvelle pour l’époque. En jaune la “poutre”, où sont raccordées les structures triangulées supportant les auvents en béton. (Réalisation Olivier BAILLON)



Le 13 octobre 1931 le concours pour la construction de deux hangars est lancé par le Service des Bases du Ministère de  l’Air, les dossiers de concours sont envoyés à 37 entreprises susceptibles d’avoir la capacité à mener à bien un tel chantier. Afin d’examiner les projets envoyés par les entrepreneurs, la commission d’examen se réunit le 16 décembre 1931 à 10 heures du matin au Service des Bases. L’objet de cette première réunion est d’éliminer les projets jugés inacceptables, de désigner les propositions qui doivent être étudiées en détail, de désigner des propositions qui ne seront examinées que si les projets dont l’étude de détail est prévue, révèlent à cet examen des erreurs ou des impossibilités. Le 2 février 1932, à 10 heures du matin, a lieu la deuxième réunion de la commission d’examen, les propositions d’une société sont retenues mais l’adjudication n’est toujours pas effectuée. Cependant, des sondages pour connaître la nature du terrain ont été effectués à leur futur emplacement.

Le camp nécessitant une alimentation en eau potable, un puits artésien est foré au nord de la ferme du Coudray à quelques centaines de mètres du passage à niveau entre Boulay et Bricy. Ce forage doit aussi alimenter le lotissement devant héberger les ouvriers. Il permettra éventuellement d’alimenter aussi les villages de Bricy et Boulay. Des locaux à usage d’habitation et des bureaux sont aménagés à la ferme du Coudray. Un ingénieur des Ponts et Chaussées y demeure afin de surveiller les travaux. Un laboratoire y est installé et abrite des machines spéciales pour l’essai des échantillons de matériaux.

C’est la société de construction de charpentes et de couvertures en ciment" de Reims qui se voit adjuger la construction des deux premiers hangars  (marchés des 17 mars 1932 et 12 août 1932), la construction du troisième hangar étant mise en attente pour le moment, elle est invitée à commencer les travaux dès le 24 mars. Un ingénieur supplémentaire est recruté par les Ponts et Chaussées pour la vérification des calculs et des plans d’exécution. Les dimensions des dallages au nord et au sud des hangars 1 et 2 sont portées de 25 à 50 mètres par rapport au marché initial. Des constructions provisoires sont édifiées pour recevoir le matériel de chantier. Un poste de transformation raccordé par une ligne provisoire au réseau, est installé et alimente les moteurs du chantier. Il fournit aussi l’éclairage. Il s’agit d’une installation temporaire, les futurs raccordements, électriques et téléphoniques seront souterrains. L’aspect des lieux change peu à peu avec l’édification de baraquements. La circulation automobile, si mince jusque là, augmente avec la venue des ouvriers et des camions de chantiers. Les vastes étendues arrachées à la vie paisible des champs connaissent désormais une activité industrielle. Une cinquantaine d’ouvriers de la région débute le nivellement du terrain en juin 1932. Ce nombre va être décuplé après que le Ministre de l’Air ait annoncé que la construction des hangars devait être terminée un an plus tard. En août suivant, le nivellement est en passe d’être terminé et le creusement des fondations est en cours. Il est prévu que les travaux soient terminés pour mars 1933, mais compte tenu du mode de fondation par pieux adopté par la société, dont l’exécution fut fort lente à cause de la résistance des terrains traversés, les fondations sont terminées avec quatre mois de retard, soit le 1er novembre 1932. Une prolongation de six mois du délai d’exécution des travaux est accordée à l’entreprise, ce qui reporte la date d’achèvement au 1er septembre 1933. Au mois de mars 1933 sont adjugés les travaux de construction de l’atelier-magasin à la même entreprise mais ils ne débuteront pas avant le mois de septembre 1933. Par contre, aucun marché n’est encore passé pour le nivellement du terrain d’atterrissage, la construction de deux pavillons et l’aménagement du lotissement destiné aux ouvriers.

Le 11 mars 1933, la construction d’un château d’eau est adjugée à la société René Herry d’Orléans. Les travaux débutent dans la foulée. L’édifice d’une contenance de 200 m3 est construit en béton armé et livré le 1er septembre 1934. Situé à l’est de la ferme du Coudray, entre l’aérodrome et le centre d’essais des moteurs, il doit pouvoir alimenter l’arsenal et le centre d’essais des moteurs. Les communes de Boulay et de Bricy pourront y être raccordées. 

En juillet, la silhouette des deux hangars commence à se dessiner dans le paysage. Les caissons ont été dégagés de leurs coffrages en bois. Sur le hangar n°1 (le plus près de Boulay), la construction des arches du toit a débuté. Le curieux peut se rendre compte de la forme définitive grâce à l’une des extrémités qui est décoffrée. On note aussi que cette technique s’affranchit de pilier et facilite donc la manœuvre des avions. Le 27 septembre, l’adjudication du 3ème hangar est décidée et revient à l’entreprise Bollard. Un autre hangar, différent dans sa conception des trois premiers hangars est destiné à la pesée des avions, et doit être équipé de pont bascule pour déplacer les avions. Le montant du chantier avoisine les 650 000 francs.

Cependant, les travaux qui avançaient à une bonne cadence s’arrêtent quand la société commence à congédier le personnel ouvrier qu’elle employait sur le chantier. L’effectif est tombé de 149 à 120, puis à 83, et n’atteint plus qu’une dizaine d’hommes en novembre 1933. Les employés ont tous reçus leur préavis de licenciement pour le 1er janvier, il est même question de les libérer le 21 décembre. La construction des hangars à double auvent a été complètement arrêtée. Les compagnons cimentiers, charpentiers et ferrailleurs licenciés le 1er décembre avaient été prévenus qu’ils pourraient reprendre leur travail dès la fin de la gelée. Ils se sont donc présentés le 5 décembre, mais ils n’ont pas été repris. Il semble que les raisons mises en avant par l’entreprise, tant vis-à-vis de l’administration que des ouvriers licenciés étaient fallacieuses et ne tendaient sans doute qu’à sauver la face et à dissimuler les difficultés financières qu’elle rencontrait. 

La faillite est prononcée par jugement du tribunal de commerce de la Seine le 21 décembre 1933. Les ossatures des deux hangars sont presque terminées, mais pour l’atelier-magasin et le hangar n°3, on n’en est qu’aux fondations. L’entreprise, par l’entremise du liquidateur-syndic Georges Gatté, tentera de faire condamner l’État à la somme de 2 184 400 francs pour les chefs suivants : erreurs et omissions dans les décomptes des travaux, erreurs sur les prix et quantité suite aux reprises d’approvisionnements, retards de l’administration dans ces décisions. 

Une décision ministérielle du 28 mai 1936 avait fixé à 47 508 francs le montant de l’indemnisation à verser à l’entreprise, considérant la somme insuffisante, le liquidateur tente d’obtenir une meilleure indemnisation. Le syndic renoncera à son action suite à une entente avec l’État Français, le dossier sera définitivement clos le 8 octobre 1938. En janvier 1935 de nouveaux marchés sont passés concernant les hangars, avec la société Sainrapt et Brice de Paris. Le Ministère n’a pas statué sur la continuation des travaux de l’atelier-magasin. Quatre bâtiments adjacents aux hangars sont construits car l’idée primitive d’aménager des bureaux, logements, vestiaires et douches dans les caissons centraux est abandonnée (puis sera reprise). Construit après les 2 autres hangars Caquot, le hangar n° 3 diffère des précédents dans la mesure ou il ne possède pas de caisson central. Sa construction démarre en 1936 et s’achèvera en 1938.



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