Cependant une nouvelle se confirme en septembre 1936 : la 22ème escadre de bombardement basée à Chartres doit être transférée à Bricy. En effet le 18 septembre 1936, le général Féquant, chef d’État-Major de l’Armée de l’Air, informe les généraux des 2ème et 3ème Régions Aériennes de la mise en route de la 22ème escadre aérienne de Chartres vers Orléans (on peut aussi trouver l’appellation 22ème escadre lourde de défense). La 22ème escadre aérienne devait être installée sur son nouveau terrain pour le 15 novembre 1936, elle est rattachée à la 9ème Brigade Aérienne de Tours. Elle se déplace en corps constitué, les matériels volants rejoignent Bricy par la voie des airs, les matériels roulants et techniques se déplacent par voie de terre. L’échelon roulant arrive à Bricy le lundi 21 décembre au soir, il est composé d’une quarantaine de camions avec remorques, et transporte environ 200 hommes, ainsi que tout le matériel nécessaire au fonctionnement de l’escadre. L’échelon volant est resté à Chartres, depuis plusieurs jours, un brouillard intense règne sur la Beauce, et le terrain de Bricy est recouvert par une telle brume que l’atterrissage des appareils n’y est pas possible. Ce n’est que le 23 décembre 1936 que les avions de la 22ème escadre se posent à Orléans-Bricy, l’escadre est équipée de bombardiers Amiot 143. Les premiers avions se posent vers 13h30, et vers 14h30 le dernier avion se pose sur le terrain, ce sont en tout une trentaine d’Amiot 143 et six Potez 25 d’observation qui prennent place dans les hangars.

Alignement d'Amiot 143 sur le terrain de BricyAlignement d'Amiot 143 sur le terrain de Bricy

La Base Aérienne d’Orléans-Bricy est créée à compter du 1er novembre 1936, à l’exception de son parc qui est créé ultérieurement. Dès son arrivée sur le terrain d’Orléans-Bricy, la 22ème escadre aérienne cesse d’être administrée par la Base Aérienne de Chartres pour l’être par la Base Aérienne d’Orléans-Bricy. En attendant la création d’un parc à Bricy, c’est le parc de la Base Aérienne de Tours qui travaille au profit de la 22ème escadre. Le tableau d’effectifs de la Base Aérienne d’Orléans-Bricy est de 401 personnels militaires plus 90 personnels civils. Bien que le personnel prévu paraisse conséquent, il faut remettre ces éléments dans le contexte de la création de la Base, à savoir des infrastructures à peine terminées, des travaux qui ne feront que s’amplifier jusqu’en 1940, le parc qui n’est pas opérationnel à l’arrivée de l’escadre, puisque c’est le parc de la Base de Tours qui gère la logistique de Bricy, compte tenu de l’effectif prévu au parc c’est environ 200 personnels qui n’œuvrent pas tout de suite sur la Base. Le commandant adjoint au Commandant de Base est aussi chargé de la mobilisation, un des capitaines adjoints de l’État-Major de la Base Aérienne fait fonction d’adjoint technique et commande les Moyens Généraux, l’autre seconde le Commandant de Base dans l’administration du bataillon de l’air. Bien que prévu au tableau d’effectifs, le Service Médical est réduit au strict minimum avec un sous-officier chargé de l’infirmerie et sans officier médecin. Du coté du bataillon de l’air, la première compagnie est chargée d’administrer le personnel de la Base, la deuxième compagnie est censée administrer le personnel du parc. Ce sont des débuts difficiles pour la nouvelle Base Aérienne du point de vue opérationnel et logistique, en ce qui concerne le personnel, la tâche n’est pas facilitée dans des baraquements provisoires et avec l’absence de parc sur le terrain, nous le verrons plus tard en 1938 au travers d’une note de l’État-Major de l’Armée de l’Air.

En avril 1937 l’État-Major de l’Armée de l’Air précise dans une note la répartition des unités et commandements de l’air en présence à Orléans, qui s’établit ainsi :

- Un État-Major de division aérienne (Orléans-ville)

- Un État-Major de commandement de l’air régional (Orléans-ville)

- Un Groupe Aérien Régional (Orléans-Saran)

- Une escadre aérienne (Orléans-Bricy)

- Un bataillon de l’air (Orléans-Bricy)

Il est envisagé d’installer une deuxième escadre aérienne à Bricy compte tenu de l’importance des installations, cependant le projet ne verra jamais le jour, la suite des événements plongeront la base dans une autre perspective.

Revenons sur l’installation de la 22ème escadre, on peut se demander si ce transfert ne fut pas un effet d’aubaine pour occuper un terrain devenu sans affectation précise. En effet, les revirements de situations successifs sur l’utilisation de la plate-forme de Bricy nous montrent qu’en 1936, il n’existe plus d’utilité pour les deux énormes hangars Caquot. Les projets de centre d’essais ne seront pas réalisés à l’exception des moteurs et des hélices. La destination du terrain peut servir à un autre usage malgré le manque de facilité pour l’implantation d’une toute nouvelle Base Aérienne. La 22ème escadre effectuera ce transfert sur un terrain mal préparé et encore en chantier. La raison Survol de la base aérienne par un Amiot 143 dont on voit la roulette de queue.


officielle est d’éloigner les avions de la trop grande proximité de la ville de Chartres et de positionner les terrains de l’aviation de bombardement lourde au sud de la Loire (ce qui est vrai à quelques kilomètres près, puisque le terrain de Bricy se situe à environ 13 kilomètres au nord de la Loire). Nous avons pour témoignage l’historique de la 22ème escadre où l’on peut lire que : "Les routes existantes sont celles établies hâtivement pour l’acheminement des matériaux de construction. On patauge dans la glaise détrempée. Sur le terrain, les avions s’embourbent à qui mieux mieux et lorsque le froid s’en mêle, les mécaniciens dans les hangars, secrétaires et le personnel navigant dans les autres locaux, battent la semelle et soufflent dans leur doigts congestionnés car le chauffage se limite à quelques braseros empruntés sur les chantiers. On regrette Chartres..."

Si l’infrastructure laisse à désirer, le personnel n’est pas mieux loti sur le plan aéronautique, il suffit pour cela de consulter les archives du Lieutenant Hatier, qui fait les remarques suivantes : "En raison des difficultés que présente la dénivellation du terrain de Bricy, et compte tenu des obstacles avoisinants..." (les avions peuvent être invisible depuis les parkings des hangars lorsqu’il se trouvent dans la zone d’atterrissage) " la présence d’un officier de piste est indispensable au poste-vigie pendant l’heure du repas de midi. A tout instant de la journée (par temps volable) des avions étrangers à la Base peuvent faire escale à Bricy". Mais l’officier de piste ne dispose même pas d’une paire de jumelle pour identifier les avions, ni même d’un téléphone pour donner l’alerte en cas de panne d’un avion dans la zone critique où il disparaît de la vue dès que l’on se trouve à hauteur de sol. La manoeuvre des avions pose également son lot de difficultés toujours en raison du sol argileux et du manque de surfaces bétonnées, le témoignage du lieutenant Hatier est éloquent : "Le hangar numéro 3 a été livré à l’autorité militaire avec, pour sortie des avions, une aire cimentée de 8 mètres de large ; au delà le sol se présente sous forme de terre argileuse rapportée. La largeur de l’aire cimentée est nettement insuffisante pour permettre le passage des avions, du hangar en piste, et inversement ; la manipulation des avions doit donc se faire dans un bourbier inimaginable qui a pour conséquence, de mobiliser à chaque sortie ou rentrée d’appareil, un personnel trois fois plus nombreux qu’il ne convient normalement. Pour les manoeuvres de gros appareils, il est nécessaire de faire appel au concours du personnel, secrétaires, magasiniers, armuriers, etc..." A toutes ces difficultés on peut ajouter le déficit chronique en effectif. Malgré les pénuries d’hommes et de matériel, et à l’image des personnels de l’Armée de l’Air, chacun fera de son mieux pour assurer les missions dévolues aux unités. Parmi celles-ci, on peut citer : les convoyages d’avions, les vols d’essais, les vols de nuit, l’entraînement au tir et au bombardement, les manoeuvres et exercices aériens, l’entraînement à la navigation et à la recherche d’objectif. La 22ème escadre avec ses vénérables Amiot, sera inspectée par le Général Féquant le 12 février 1937, ce sera l’occasion de sortir les avions sur le parking entre les deux hangars Caquot. Le 8 mars 1937, à 17 heures, une délégation d’officiers et de sous-officiers de la Base Aérienne d’Orléans-Bricy et du centre de Saran est reçue à la mairie d’Orléans. Les défilés aériens font également parti des sorties effectuées par l’escadre. 

Au printemps 1937, le nivellement du terrain est fait en très grande partie et on a procédé à un premier ensemencement. L’escadre dispose à ce moment de 100 hectares. Un marché est passé pour le balisage de cette partie. Un deuxième forage est creusé pour l’alimentation d’un autre château d’eau (cependant il ne sera pas achevé).




CE SITE A ÉTÉ CONSTRUIT EN UTILISANT