Aérodrome des Groues premier terrain d'aviation à Orléans.

Afin d'entrer en course pour la création d'un grand aéroport à Orléans une soixantaine d’Orléanais, pour la plupart anciens pilotes militaires ou réservistes, ont formé dans le courant de l’automne 1928, le "Comité Régional Orléanais d’Action Nationale Aéronautique" : le C.R.O.A.N.A. Le but de ce comité est "d’apporter à titre privé, et en accord avec le Ministre de l’Air et les pouvoirs publics, une contribution effective et de valeur à la renaissance économique de l’aviation française".

Si l’agglomération orléanaise possède déjà un aérodrome aux "Chimoutons" sur la commune de Saran, ce dernier trop petit, ne peut accueillir les gros porteurs tels que les Farman Goliath. Le but du C.R.O.A.N.A est donc de créer dans la région un vaste aéroport. Un endroit est déjà pressenti, au nord d’Orléans, sur la commune des Barres. Le projet est ambitieux car outre la création d’un aéroport mixte d’aviation et d’hydraviation, il prévoit aussi de fonder un centre école pour la formation technique et pratique de mécaniciens et de pilotes.

Le projet qui couvre quatre cents hectares serait implanté sur la commune des Barres à l’angle de la route de Châteaudun et de la route du Mans. Les autres objectifs du comité sont de constituer une association aéronautique  dans le Loiret (Les Ailes Ardentes) et de faire une propagande aéronautique intense pour donner au pays un véritable "sens de l’air". Il ne s’agit pas moins que de vouloir faire de l’aéroport d’Orléans la gare aérienne centrale de la France et de remplacer Le Bourget.

En décembre 1929, le vice-président de la chambre de commerce d’Orléans lit un rapport dans lequel il découvre l’existence et les projets du C.R.O.A.N.A, la chambre de commerce s’intéresse alors à la création de l’aéroport, mais un épineux problème s’esquisse : comment financer ce projet ?

Le C.R.O.A.N.A qui recherche des solutions fait appelle à René Fonck. Ce dernier, membre de la Société Anonyme de Construction d’Aéroports (S.A.C.A.P), se déplace plusieurs fois à Orléans pour évoquer le financement. Le budget nécessaire pour la construction est énorme et se chiffre en dizaine de millions de francs. Les tractations avec la S.A.C.A.P tournent court. Le C.R.O.A.N.A ne peut compter sur une participation financière de la chambre de commerce, le budget de cette dernière ne le permettant pas. Il se tourne alors vers les collectivités locales mais obtient la même réponse. Il ne peut donc qu’espérer une subvention de l’État.  
Toutefois, la chambre de commerce d’Orléans et du Loiret qui "regrette que la faiblesse de son budget ne lui permette d’accorder une aide financière appréciable aux promoteurs du projet" garantit sans réserve son appui moral au projet. Le C.R.O.A.N.A se rend à l’évidence : un tel projet n’est viable qu’avec l’appui de l’État qui pourrait être intéressé tant du point de vue économique que militaire. 

Le 13 juin 1930, le C.R.O.A.N.A va recevoir un soutien de poids en la personne du général Boucabeille. Ce dernier, directeur du Comité Français de Propagande Aéronautique, milite pour le développement de l’aviation commerciale. Lors de son exposé devant une assemblée d’élus orléanais, il explique que le comité qu’il préside, a pour but de développer l’aviation civile et notamment les routes aériennes, il espère faire à Orléans un aérodrome sur une route aérienne vers Bordeaux.

La question sur le développement de l’aviation à Orléans est donc posée. Bien que disposant d’un terrain d’aviation depuis 1914 sur la commune de Saran, il fallut envisager l’acquisition de nouveaux terrains plus éloignés de la ville et par conséquent moins chers et disposant de plus d’espace. A cet effet, le C.R.O.A.N.A est en rapport avec la société immobilière Lecomte et Nathan de Paris depuis le début de l’année. C’est à cette même époque qu’ont lieu les premières relations entre le C.R.O.A.N.A et le Ministère de l’Air qui s’intéresse à l’affaire.

Terrain de Saran utilisé par l'aviation militaire et civile, sa proximité avec la ville empêchait un développement de plus grande envergure.

Le mercredi 10 décembre 1930, la société Lecomte et Nathan dépose, au Ministère de l’Air, un projet d’aménagement d’un terrain d’aviation au lieu dit "Les Barres" sur le territoire de la commune de Boulay. Le terrain qui est "destiné à la fois à l’aviation civile et à l’aviation militaire serait d’une superficie de 500 hectares, il est même prévu une fosse de 100 hectares pour les hydravions." Parmi les projets qui n’ont pas manqué, on peut noter ici pour la première fois un changement dans son utilisation puisque l’aéroport aura aussi un usage militaire. C’est certainement en rapport avec l’annonce faite par le journal "Le Républicain Orléanais et du Centre" qui publie : "Rappelons qu’un régiment d’aviation – le 22ème – doit s’installer bientôt dans notre ville. 

Dans l’après-midi du 21 janvier 1931, Paul Painlevé, alors Ministre de l’Air, accompagné de membres de son cabinet, du général Barès, et de membres de la société Lecomte et Nathan se rendent à Orléans et plus particulièrement à l’angle de la route de Châteaudun et de la route du Mans. Après avoir étudié la topographie de l’endroit et les possibilités d’aménagement sur une carte d’état-major, le petit comité poursuit vers la ferme des Barres où il s’arrête de nouveau. Il s’engage alors dans un chemin situé à gauche et fait le tour des terres qui doivent constituer le futur champ d’aviation.

A l’issue de cette visite, on comprend que les bases du futur aéroport sont posées et que le Ministère de l’Air est bien intéressé par le projet. Cependant cet emplacement est vite abandonné du fait de la présence de lignes électriques à haute tension dont le déplacement nécessiterait un engagement financier supplémentaire. Un second projet est alors proposé, sur des terrains se situant au sud de la route d’Orléans à Châteaudun, à peu près en face de l’emplacement actuel. Les opérations d’achat de terrains sont alors entamées par la société Lecomte et Nathan qui agit pour le compte de l’État. Tout semble en bonne voie pour la concrétisation du projet lorsque la société Lecomte et Nathan est dissoute. Le C.R.O.A.N.A continue toutefois ses pourparlers avec le Ministère et d’autre part, prend des options sur les terrains, par l’intermédiaire de Maître Victor, notaire à Saint-Péravy-la-Colombe.

C’est à ce moment que la société Bernheim, puissante société immobilière de Paris, entre en jeu et prend des options sur des terrains situés au nord de la route nationale, sur des terrains situés dans un quadrilatère comprenant les communes de Bricy, Coinces, Saint-Péravy-La-Colombe et Boulay qui pourraient convenir.

Les dirigeants du C.R.O.A.N.A l’apprennent et font les démarches nécessaires auprès du Ministère pour maintenir la priorité de leurs terrains qu’ils estiment plus avantageux. Mais ces démarches restent vaines car le Ministère a déjà pris la décision de construire l’aéroport sur les terrains proposés par le concurrent. Un projet d’expropriation pour cause d’utilité publique est établi par la préfecture en août 1931. Le C.R.O.A.N.A ne reconnaît plus son projet. La destination de l’aéroport ne semble plus faire de doute quant à une utilisation militaire : on parle également du transfert du Centre d’Essais du Matériel Aérien de Villacoublay vers Bricy.

Ce nouveau projet définit l’emplacement définitif du terrain et nous indique ce qu’en seront les limites : la voie ferrée Orléans-Chartres à l’est, la route nationale Orléans-Châteaudun à l’ouest, le village de Boulay au sud et la ferme de Sennelay au nord-ouest. Les terrains sont répartis entre les communes de Boulay, Bricy et Coinces. Les fermes de la Beaucerie, du Coudray et de Sennelay englobées dans l’ensemble sont achetées et désaffectées. Considérant que la création de l’aéroport d’Orléans-Bricy est d’un intérêt national et d’un intérêt général pour la région orléanaise, la chambre de commerce d’Orléans et du Loiret émet un avis favorable. Le 24 décembre, Jean-Louis Dumesnil (député et rapporteur du budget de l'aéronautique) confirme le début des travaux.


 



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